Port du voile : le débat traverse la communauté éducative
2019-11-03 13:36:07
Le débat au sein du gouvernement sur le port du foulard a ravivé, chez les directeurs d’école, des questionnements que certains pensaient « dépassés ».
Demander aux directrices et aux directeurs d’école s’ils rencontrent des « obstacles » ou des « contestations » lors de l’organisation des sorties scolaires, c’est, invariablement, s’entendre opposer un « non ». Rien, en tout cas, qui ne puisse se régler « en dialoguant », souffle tel enseignant, en poste à Créteil. « Dans l’écoute mutuelle », renchérit tel autre, à Paris.
Il n’empêche : les divisions sur le port du voile qui se sont exprimées au sein du gouvernement et la position de fermeté martelée par le ministre Blanquer ont réveillé des questionnements que beaucoup pensaient « dépassés ».
« Prétendre que les mères voilées sont un problème pour l’école me met hors de moi », souffle Catherine Da Silva, l’une des rares professeures à évoquer le sujet sans réclamer l’anonymat – elle représente, en Seine-Saint-Denis, le syndicat SNUipp-FSU. Alors qu’une proposition de loi « tendant à assurer la neutralité religieuse des personnes concourant au service public de l’éducation » devrait être examinée au Sénat en séance publique à partir du 29 octobre, l’enseignante n’en démord pas : « Heureusement qu’elles sont là, ces mamans. C’est sur elles qu’on peut compter, elles qui font des sandwichs pour les pique-niques et qui tiennent les stands des kermesses… Et oui, elles qui assurent, aussi, qu’on le veuille ou non, la bonne marche des sorties ! »
En vingt ans de direction d’école, Catherine Da Silva assure n’avoir eu vent que d’un seul épisode problématique. Un cas… sur 840 écoles dans le département. « Une collègue, au moment de la circulaire Chatel [qui, en 2012, a insisté sur la neutralité religieuse des parents en sortie], avait voulu dissuader une maman de participer à une sortie, raconte-t-elle. La hiérarchie était intervenue pour lui rappeler que rien, dans la loi, ne l’interdit [sauf s’il y a perturbation objective au bon fonctionnement de la sortie ou trouble à l’ordre public, a précisé le Conseil d’Etat en 2013]. Ce rappel a suffi à calmer le jeu. »
« Un message qui passe »
Un « cas un peu limite » en trente-cinq ans de carrière, c’est aussi ce dont fait état Véronique. « On trouve, au sein de la communauté éducative comme un peu partout ailleurs, des laïcards chez qui le voile suscite des crispations. » Elle-même dit avoir croisé la route, à deux reprises, d’inspecteurs « suggérant » aux enseignants de se tourner vers d’« autres » parents.