Un diplomate français en visite en Algérie pour rétablir ses relations
2021-12-08 18:04:33
Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian s'est entretenu mercredi en Algérie dans le but de combler le dernier fossé entre le pays d'Afrique du Nord et son ancien dirigeant colonial.
Le voyage de Le Drian, tenu secret jusqu'à la dernière minute, est une "visite de travail, pour évaluer et relancer la relation" et il devrait rencontrer le président Abdelmadjid Tebboune, a indiqué à l'AFP une source du ministère français des Affaires étrangères sous couvert d'anonymat.
L'agence de presse officielle algérienne APS a confirmé que le diplomate français avait rencontré son homologue algérien Ramtane Lamamra lors "d'une visite de travail et d'une évaluation des relations bilatérales".
Les relations entre Alger et Paris ont été tendues pendant une grande partie des six décennies depuis que l'ancienne colonie française a obtenu son indépendance après 130 ans d'occupation.
Le président Emmanuel Macron est allé plus loin que ses prédécesseurs en admettant les abus français à l'époque coloniale.
Mais les liens se sont effondrés en octobre après que Macron a accusé le « système politico-militaire » algérien de réécrire l'histoire et de fomenter « la haine envers la France ».
Dans des remarques aux descendants de combattants de l'indépendance, rapportées par Le Monde, Macron s'est également demandé si l'Algérie avait existé en tant que nation avant l'invasion française dans les années 1800.
Survenant un mois après que Paris a décidé de réduire fortement les quotas de visas pour les citoyens algériens, marocains et tunisiens, ces commentaires ont déclenché une réaction féroce de la part de l'Algérie.
Le pays a retiré son ambassadeur et interdit les avions militaires français de son espace aérien, qu'ils utilisent régulièrement pour mener des opérations contre des groupes djihadistes en Afrique de l'Ouest et dans la région du Sahel.
Les commentaires ont également incité Tebboune à boycotter un important sommet de novembre à Paris sur le voisin déchiré par la guerre de l'Algérie, la Libye, promettant que l'Algérie « ne ferait pas le premier pas » pour rétablir les relations.
Le différend a suscité une rare expression de contrition de la présidence française, qui a déclaré qu'elle "regrettait" les malentendus causés par ces propos.
Un collaborateur du bureau de Macron a déclaré que le dirigeant français "a le plus grand respect pour la nation algérienne et son histoire et pour la souveraineté de l'Algérie".
Le ministre algérien des Affaires étrangères Lamamra s'est félicité de cette déclaration et a finalement représenté l'Algérie à la conférence sur la Libye.
La visite de Le Drian intervient alors que l'Algérie se prépare à célébrer le 60e anniversaire de son indépendance en mars.
Macron, premier dirigeant de la France né après l'ère coloniale, a fait de la réconciliation historique une priorité et de la construction d'une relation moderne avec les anciennes colonies.
Plus tôt cette année, il a reconnu que des officiers français avaient torturé et tué l'avocat algérien Ali Boumendjel en 1957.
Macron a également condamné en octobre des "crimes inexcusables" lors d'une répression de 1961 contre des manifestants indépendantistes algériens à Paris, au cours de laquelle la police française dirigée par un ancien collaborateur nazi a tué des dizaines de manifestants et jeté leurs corps dans la Seine.
Un rapport commandé par le président à l'historien Benjamin Stora plus tôt cette année a demandé une commission vérité sur la guerre d'Algérie, mais Macron a exclu de présenter des excuses officielles.
Et alors qu'il brigue sa réélection l'année prochaine, il se méfie de fournir des munitions aux opposants nationalistes d'extrême droite Marine Le Pen et Eric Zemmour.