En Afghanistan, tous les voyants sont au rouge

  • 2019-09-28 14:54:26
Ce samedi 28 septembre, 9,7 millions d’Afghans sont appelés aux urnes pour élire leur nouveau président dans 5 376 centres de vote. Parmi les 16 candidats, Ashraf Ghani est candidat à sa propre réélection après un quinquennat aux résultats mitigés. Plus de la moitié de la population afghane vit sous le seuil de pauvreté, selon les estimations de la Banque mondiale. Estimé à 38 % en 2011, le niveau de pauvreté atteint près de 55 % en 2018. Les foyers dont les revenus reposent principalement sur l’élevage et l’agriculture sont près de 66 % à vivre avec moins de 1 dollar par mois. L’insécurité, l’incertitude de l’avenir liée au scrutin présidentiel, l’impact du retrait d’une partie des troupes étrangères en 2014, ainsi que la sécheresse qui s’est abattue sur plusieurs parties du pays sont autant de facteurs qui permettent d’expliquer ces chiffres alarmants disait le directeur de la Banque mondiale en Afghanistan, il y a quelques mois. « Pour que notre pays soit en position de force économiquement, il nous faudrait un taux de croissance de 8 %. Pour l’atteindre, il faudrait des miracles », réagit un économiste, employé du gouvernement, qui préfère garder l’anonymat. Le taux de croissance est de 1,2 %. Selon lui, le président Ashraf Ghani n’a pas assez investi dans l’agriculture alors que 80 % de l’économie repose dessus. « Le chef de l’État a investi dans un corridor aérien permettant d’exporter dans des pays voisins comme l’Inde. Mais les marchandises envoyées sont des fruits et des légumes dont la valeur monétaire ne permet pas de rentabiliser le coût du transport », ajoute-t-il indiquant que seul le soutien financier de la communauté internationale permet de combler les pertes financières de ce modèle d’import-export mal pensé. « Notre balance commerciale est désastreuse, poursuit-il. Nous importons pour 10 milliards de dollars par an et nous exportons pour seulement 1 milliard de dollars chaque année. » Un taux de chômage record « Notre économie » est en ruine, s’insurge le politologue Ahmad Saidi, régulièrement invité sur les plateaux de télévision pour partager ses analyses. « Ashraf Ghani est un populiste qui avait fait de belles promesses de campagne sans les tenir », assène-t-il pointant du doigt le taux de chômage qui n’a fait que s’aggraver au cours de son mandat. « J’ai plusieurs fois par semaine des hommes qui viennent me demander si je peux les faire travailler en échange d’un repas », raconte un restaurateur. « C’est désastreux de voir tant de misère, s’insurge-t-il ». L’organisation internationale du travail a fait part de son inquiétude en décembre 2018 en publiant les chiffres du chômage par pays dans le monde. Ce taux est d’environ 30 % en Afghanistan, le plus élevé au monde selon l’organisation des Nations-Unies. Les jeunes qui constituent sont les plus touchés. En Afghanistan, 75 % de la population a moins de trente ans. Le taux de chômage est le plus élevé, 31 % pour la catégorie des 15-24 ans, 42 % sont sans aucune activité, ils ne sont ni scolarisés, ni employés souligne la Banque mondiale. La promotion de la jeunesse et des femmes C’est à cette jeunesse que le président Ashraf Ghani a choisi de s’adresser tout particulièrement dans sa campagne. Nombreux sont ceux qui soutiennent le président-candidat connu pour sa volonté de promouvoir la jeunesse au sein des institutions gouvernementales. Le chef de l’État afghan a nommé plusieurs jeunes trentenaires à des postes de vice-ministres. Il s’est entouré au palais présidentiel de centaines de jeunes conseillers, des hommes et des femmes qui pour la plupart ont étudié à l’étranger grâce à des bourses financées par les pays d’accueil. Le président a aussi promu de nombreuses femmes à des postes ministériels. Il s’est aussi attaché à faire remplacer les généraux de l’armée qui ont fait leurs armes lors de l’invasion soviétique en 1979, par de jeunes généraux formés aux formations militaires solides. Cette politique n’est pas forcément effective selon le politologue Nasrullah Stanekzai : « Faire soudainement remplacer 2 000 personnes par des jeunes non compétents, c’est une erreur. Remplacer un général qui a une expérience de 40 ans par un jeune sans expérience, c’est une erreur. On ne peut pas ramener la paix avec des jeunes sans expérience ». Les mêmes critiques ont émergé lorsque le président a nommé Hamdullah Mohib, l’ancien ambassadeur de l’Afghanistan à Washington, âgé de 36 ans, au poste de chef de la sécurité nationale pour remplacer Mohammad Hanif Atmar, ancien ministre de l’Intérieur afghan, qui occupait cette fonction avant lui.

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