« Le statu quo ne peut plus perdurer » : le pari risqué de l’Autorité palestinienne face à l’annexion
2020-06-10 18:59:09
Ramallah suspend ses accords sécuritaires et économiques avec Israël, pour faire reculer Nétanyahou sur ses plans d’annexion de la Cisjordanie occupée. Les conséquences, douloureuses, se font déjà sentir.
Au début, rares sont ceux qui ont pris la menace du raïs au sérieux. Le 19 mai, en plein mois du ramadan, le président palestinien est apparu derrière son bureau massif, encadré de deux immenses drapeaux. En réaction aux velléités israéliennes d’annexion d’une partie de la Cisjordanie occupée, Mahmoud Abbas a annoncé que l’Autorité palestinienne, qu’il dirige, est « absoute, à partir d’aujourd’hui, de tous ses accords avec les gouvernements américain et israélien et de toutes ses obligations basées sur ces ententes, y compris celles relatives à la sécurité ». Le vieux dirigeant de 85 ans avait déjà brandi cet avertissement à maintes reprises par le passé, sans jamais y donner suite.
Cette fois-ci, Mahmoud Abbas entend tenir sa promesse : les Palestiniens coupent, peu à peu, les ponts dans l’espoir de faire reculer les Israéliens sur leur projet d’annexion. Fin mai, le Fatah, le parti du président, a diffusé deux vidéos sur Twitter censées montrer des forces de sécurité palestiniennes barrant l’entrée d’Hébron et du gouvernorat de Bethléem aux militaires israéliens. Depuis le discours du président, « il n’y a eu aucune coopération sécuritaire israélo-palestinienne, à aucun niveau », a affirmé le premier ministre palestinien, Mohamed Shtayyeh, lors d’une conférence de presse à Ramallah, mardi 9 juin.
« Au bord de la faillite »
Honnie des Palestiniens, la coopération sécuritaire est un instrument essentiel du contrôle israélien sur la Cisjordanie occupée, interrompue une seule fois, lors de la seconde Intifada, de 2000 à 2005. Derrière les déclarations au ton grave, Ramallah a toutefois laissé entendre à l’Etat hébreu qu’il ne laisserait pas le « chaos s’installer » de l’autre côté de la ligne verte. « Il y a toujours une certaine coordination de facto, mais beaucoup moins de communication entre les deux côtés », nuance Céline Touboul, codirectrice générale de l’Economic Cooperation Foundation, l’un des artisans israéliens des accords d’Oslo.