En Cisjordanie, la rupture de la coopération sécuritaire avec Israël crée des tensions

  • 2020-06-27 17:51:15
Depuis la fin mai, l’Autorité palestinienne affirme avoir coupé les communications avec Israël. Les policiers n’interviennent plus dans les zones sous contrôle israélien. La bannière barre l’entrée de la maison des Khader, au pied des collines de Naplouse, dans le nord de la Cisjordanie. Un peu à l’écart du centre-bourg d’Hawara, deux portraits d’hommes souriants se détachent sur le plastique blanc : Jalal, 34 ans, et Kamal, 31 ans, assassinés le 31 mai, avec leur oncle, Jihad, 38 ans. « C’est une peine impossible à décrire », soupire Rehab Sharaf, leur mère, entourée des cinq enfants de Jalal dans le salon. Ce printemps, Kamal s’est introduit dans l’une des bâtisses abandonnées d’une famille palestinienne des environs. Les propriétaires se sont offusqués, l’affaire s’est envenimée et un matin, une dizaine de jeunes hommes armés de fusils automatiques ont pris son frère Jalal. Ils l’ont abattu avec son oncle puis ont assassiné Kamal, arrivé peu après sur les lieux. « Ils étaient prêts à tuer tout le monde », pleure la tante, Rameh Khader. Le jour du crime, « tout s’est passé très vite, personne n’aurait pu intervenir à temps », explique le voisin d’en face, Mjahed Al-Hassan. La veille, deux hommes armés avaient déjà menacé Kamal, devant chez lui, tirant « plusieurs coups de feu », raconte cet ancien de l’armée jordanienne. Hawara est située en « zone C », partie de la Cisjordanie placée sous contrôle total israélien par les accords d’Oslo. L’armée israélienne s’applique à ne pas y intervenir dans de telles affaires civiles. En temps normal, les policiers palestiniens auraient donc demandé une autorisation israélienne, pour arrêter eux-mêmes les auteurs des coups de feu et les conduire au poste, en « zone A », palestinienne, où ils ont pleine autorité. Sauf que, depuis le 20 mai, l’Autorité palestinienne (AP) a officiellement rompu la coopération sécuritaire avec l’Etat hébreu. Elle entend ainsi protester contre l’annexion promise par le gouvernement israélien d’une partie de la Cisjordanie, à partir du 1er juillet. Cette rupture est lourde de risques. Déjà, elle livre à eux-mêmes une partie des habitants de Cisjordanie sous contrôle direct israélien. A Hawara, « sans coordination, [les meurtriers] n’ont pas pu être amenés au commissariat », la veille du crime ils sont restés libres, déplore Awad Nejim, le porte-parole de la municipalité. Depuis mai, les policiers palestiniens n’entrent plus en zone C, détaille-t-il, ou alors « ils viennent habillés en civil et sans arme », arrivant souvent après tout le monde. Sur un groupe WhatsApp, M. Nejim fait défiler des messages d’appel à la rescousse, pour désamorcer là une dispute de voisinage, ici demander un coup de main. Depuis quelques semaines, les responsables locaux, membres ou proches du Fatah, le parti au pouvoir, se sont organisés face au vide dans le maintien de l’ordre.

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