RIC demandé par les gilets jaunes : et ailleurs dans le monde, comment ça se passe ?
2019-01-18 20:26:58
Plusieurs pays du monde prévoient des consultations populaires qui font penser au référendum d’initiative citoyenne réclamé par les gilets jaunes.
À l’heure où s’ouvre le grand débat national souhaité par le président de la République, les gilets jaunes tiennent plus que jamais à une de leurs propositions phares, le référendum d’initiative citoyenne (ou RIC) ; ce jeudi, une des leaders du mouvement, Priscilla Ludosky, a lancé une pétition en ligne pour demander entre autres la création de ce type de consultation populaire, souhaité par une large majorité des Français selon un sondage publié début janvier.
Dans un tract largement diffusé dans les manifestations au mois de décembre, le mouvement précisait ce qu’il entendait par "RIC" : pour les gilets jaunes, le référendum d’initiative populaire devrait pouvoir permettre quatre types d’actions à condition de réunir au préalable 700 000 signatures citoyennes : la promulgation d’une loi, l’abrogation d’une loi, la modification de la Constitution ou encore la révocation du mandat d’un élu.
Si de nombreux pays dans le monde prévoient une ou plusieurs de ces possibilités, aucun ne propose les quatre en même temps. Tour d’horizon de ce qui existe chez nos voisins et dans d’autres continents.
1– En Suisse : le référendum constitutionnel La Suisse est le pays que les défenseurs du RIC citent le plus souvent en exemple. Les référendums y sont très fréquents, et les citoyens suisses peuvent lancer une "initiative populaire" pour demander une modification de la Constitution fédérale. Pour cela, un minimum de sept électeurs doivent rassembler 100 000 signatures sur une durée de 18 mois. Après un long processus, qui prend environ quatre ans, les électeurs sont appelés aux urnes. La proposition doit, pour être validée, recueillir la double majorité du peuple et des cantons. À noter que le Parlement peut proposer un contre-projet, qui est également soumis au vote le cas échéant.
L’absence d’un minimum de participation pour approuver une disposition est critiquée par certains membres de la classe politique suisse, à l’image de la parlementaire des Verts Lisa Mazonne qui confie à France Culture qu’"avec un taux de participation d’environ 40% à chaque scrutin, c’est une minorité, dans le fond, qui décide des grandes directions."
2– En Italie : le référendum abrogatifLes gilets jaunes souhaitent aussi que le RIC permette de revenir sur des lois déjà approuvées et votées, ce qui a provoqué la crainte de certains vis-à-vis du mariage pour tous ou de l’avortement, par exemple. En Italie, ce type de référendum, dit "abrogatif", existe depuis 1970. Il faut pour cela qu’un cinquième des membres d’une des deux assemblées ou cinq régions ou encore 500 000 électeurs demandent la suppression totale ou partielle d’une loi déjà en vigueur. Pour être validé, le scrutin doit réunir au moins 50% des électeurs inscrits.
En 2011, les Italiens avaient ainsi obtenu l’abrogation de lois portant sur la privatisation de l’eau et sur la relance de la construction de centrales nucléaires (à plus de 94%). Les référendums ne concernent pas la fiscalité, le budget, l’amnistie et la ratification des traités internationaux.
3– En Californie : le référendum législatifDe tous les Etats de l’Ouest américain, qui possèdent une culture ancienne du référendum populaire, la Californie est celui qui en est le plus friand : 354 initiatives citoyennes ont vu le jour depuis 1912, dont 115 ont été approuvées. Contrairement au système suisse, le champ constitutionnel n’est pas le seul concerné et les citoyens peuvent proposer des lois sur des sujets plus que variés ; en 2016, parallèlement à l’élection présidentielle, les citoyens devaient ainsi se prononcer sur des dizaines de questions comme l’abolition de la peine de mort, la légalisation du cannabis, mais aussi le port obligatoire du préservatif dans les productions pornographiques ou la hausse du prix du paquet de cigarettes, par exemple.
Cette profusion de votes est désormais remise en question : "destinés au départ à lutter contre les lobbys, l’emprise des grandes entreprises et les conflits d’intérêts, ces référendums sont désormais au cœur des groupes de pression qui injectent d’énormes quantités d’argent dans des campagnes de pub", expliquait en 2016 la correspondante de Libération Marisa Endicott.
4– Au Venezuela et en Equateur : le référendum révocatoireLa quatrième dimension du RIC concerne la révocation des mandats électifs, une proposition portée par Jean-Luc Mélenchon pendant la campagne présidentielle de 2017. À l’échelon local, cette procédure existe dans plusieurs pays d’Amérique du Sud (courant au Pérou), dans plusieurs cantons suisses, une trentaine d’Etats américains et trois Länder allemands.
Mais les gilets jaunes souhaitent que le référendum révocatoire puisse concerner tous les élus, du conseiller municipal au président de la République, ce qui est beaucoup plus rare. Seuls deux pays prévoient la révocation du chef de l’Etat : l’Equateur et le Venezuela. À Quito, les signatures de 15% des inscrits sont nécessaires pour que le vote ait lieu et la majorité absolue suffit à renverser le président. À Caracas, le seuil de pétition est de 20% des inscrits et il faut que le nombre de voix opposées au président soit supérieur au nombre de voix qu’il a obtenu lors de son élection. En 2004, Hugo Chavez avait dû affronter un référendum révocatoire, qu’il avait surmonté avec 59% des voix en sa faveur.
AFP.