La Banque centrale européenne mise sous pression par la Cour constitutionnelle allemande
2020-05-06 21:04:09
La BCE est mise en demeure de s’expliquer sur son programme d’achat de dettes. Les retombées juridiques, économiques et politiques vont être profondes.
La Cour constitutionnelle allemande a posé une bombe à retardement juridique sous les fondations même de la zone euro, mardi 5 mai. Dans un jugement qui va faire date, elle a exigé de la Banque centrale européenne (BCE) qu’elle justifie son programme d’achat de dettes (« quantitative easing ») lancé en 2015. Après un long processus juridique, et un aller-retour avec la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), les huit juges constitutionnels allemands ont décidé par sept voix contre une que l’institution monétaire n’avait pas expliqué pourquoi son action était « proportionnelle » aux dangers économiques auxquels la zone euro faisait face à l’époque.
Ils mettent en demeure la BCE de se justifier dans les trois mois. Sinon, ils ordonnent à la Bundesbank – principale actionnaire de l’institut d’émission de Francfort – de cesser de participer au programme de rachat de titres. Alors que la BCE a lancé en mars un énorme « plan pandémie » de 750 milliards d’euros d’achats de titres, et que le retour d’une crise de la zone euro n’est pas écarté, le jugement tombe au plus mauvais moment.
A court terme, les conséquences sont limitées. D’abord, parce que la BCE a trois mois pour réagir. Son conseil des gouverneurs, réuni dans l’urgence mardi soir, s’est contenté de « prendre note » du jugement. Ensuite, l’eurosystème peut contourner la Bundesbank, si nécessaire. « Nous pouvons faire les achats de titres sans passer par elle », notait une source de la BCE vendredi, en prévision de la décision.