La France et l’Allemagne jettent les bases d’une relance européenne
2020-05-21 13:17:20
La proposition franco-allemande d’un emprunt européen de 500 milliards d’euros met fin à un tabou économique pour Berlin : la mutualisation des dettes, qu’exigeaient notamment l’Italie et l’Espagne depuis l’apparition de la pandémie.
Après des semaines de discussions entre leurs équipes, Emmanuel Macron et Angela Merkel ont présenté, lundi 18 mai, lors d’une conférence de presse commune, les grandes lignes du plan de relance européen qu’ils sont prêts à endosser. Physiquement distants l’un de l’autre, lui s’exprimant depuis Paris et elle depuis Berlin, les deux dirigeants ont affiché une totale unité de vue sur le plan politique. Leur objectif : garantir l’intégrité du marché unique et de la zone euro, menacée par la pandémie de Covid-19 et les ravages économiques qu’elle occasionne.
La France et l’Allemagne proposent que la Commission européenne s’endette à hauteur de 500 milliards d’euros et verse ensuite cet argent, par le canal du budget communautaire, aux Etats, régions et secteurs qui ont été le plus durement touchés par la pandémie. Cette initiative représente une petite révolution potentielle pour l’Europe. Pour l’Allemagne, elle matérialise en effet la fin de deux tabous qui ont longtemps empêché une plus forte intégration économique européenne : une mutualisation des dettes et une hausse considérable des transferts – c’est-à-dire de la redistribution entre les Vingt-Sept –, puisque 500 milliards d’euros représentent trois fois et demie le budget annuel européen actuel.
Angela Merkel, qui était encore fermement opposée à l’idée de tout endettement commun lors du sommet des chefs d’Etat et de gouvernement européens du 26 mars, s’était montrée plus ouverte ces derniers temps. Pour autant, assurait-on encore récemment à Berlin, cet argent devra être remboursé par ceux qui l’auront dépensé. Mais voilà que la chancelière est désormais d’accord pour qu’il vienne abonder le budget communautaire et soit remboursé au niveau de l’Union européenne (UE), et non pas en fonction de ce que les uns et les autres auront touché.
Surplus de solidarité
Depuis l’apparition du Covid-19, l’Italie et l’Espagne, très touchés par le virus, réclamaient à hauts cris ce surplus de solidarité. Tout comme le Portugal, la Grèce ou la France, que la récession qui commence heurte de plein fouet. A l’inverse, les pays dits « frugaux » – Pays-Bas, Autriche, Suède et Danemark, qui défendent un budget restreint pour l’UE – refusaient d’en entendre parler. L’Allemagne, qui était jusqu’ici plutôt leur alliée sur ce genre de thématique, vient donc de les lâcher.
Comment expliquer ce changement de pied ? « Merkel a compris que l’Allemagne, en s’en tirant mieux face au virus que les autres grands pays européens, avait une responsabilité immense et devait faire vraiment preuve de solidarité », explique l’économiste Henrik Enderlein, président de la Hertie School of Governance, l’équivalent de Sciences Po à Berlin. Restait à trouver le mécanisme adéquat.