Coronavirus : en France, le traçage des contacts peine à freiner la reprise épidémique
2020-08-24 14:03:24
Les lenteurs du dispositif et le manque de coopération de certains malades inquiètent, alors que les contaminations par le nouveau coronavirus se multiplient.
« Il y a eu des tensions territorialisées, avec un effet bouchon inévitable avant les départs en vacances », a ainsi admis le ministre. De nombreux pays exigent, à l’entrée sur leur territoire, un test virologique négatif de moins de quarante-huit ou soixante-douze heures. Cette obligation explique en partie les longues files d’attente observées à Paris, où les centres de dépistage sans rendez-vous sont pris d’assaut par les voyageurs.
De nombreuses personnes en bonne santé, suivant les recommandations des autorités de se faire tester « au moindre doute », battent aussi le pavé avant de participer à une réunion de famille ou d’aller rendre visite à des parents âgés.
« Nous faisons en sorte que les personnes symptomatiques, les cas contacts rapprochés, les publics fragiles et les soignants aient un accès prioritaire », a assuré le ministre, expliquant les délais par « un manque de ressources humaines ». Pour faire face aux difficultés rencontrées par certains patients, l’agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France a mis en place, le 17 août, une plate-forme téléphonique pour optimiser la prise de rendez-vous. Sur appel du médecin, elle permet d’orienter les personnes symptomatiques vers un laboratoire qui les prendra en charge dans des délais « garantis ».
En PACA, l’ARS est en train de mettre en place, avec les laboratoires de ville, une astreinte pour que les prélèvements puissent aussi avoir lieu le week-end. La création d’une plate-forme téléphonique sur le modèle de celle lancée en Ile-de-France est en discussion.
Course contre la montre
En aval, l’enquête de « contact tracing » prend également trop de temps. Faute de données disponibles, le délai précis entre l’identification d’un cas positif et l’information des cas contacts n’est pas connu − « ça dépend des zones, de la tension, de la circulation du virus », indique seulement le ministre de la santé − mais « je suis alerté par les autorités sanitaires, comme dans certaines zones d’Occitanie, par exemple », reconnaît Olivier Véran.
Le constat est identique dans plusieurs régions où les autorités sont engagées dans une course contre la montre alors que l’épidémie reprend. « L’Assurance-maladie n’attend plus forcément que les données soit renseignées par le médecin dans “Contact Covid” pour agir. On les remonte maintenant directement de Sidep [le fichier dans le lequel les laboratoires enregistrent tous les résultats tests] », explique Sébastien Debeaumont, directeur adjoint de l’ARS PACA. Cette chaîne raccourcie a été expérimentée dans le golfe de Saint-Tropez (Var) où des campagnes de dépistage ont été organisées à la suite de l’explosion du nombre de cas.
Un « autre problème » semble émerger, selon le ministre : « De plus en plus de réticences à donner la liste des contacts − en général quatre ou cinq par personne − et à respecter l’isolement », notamment parmi les plus jeunes qui ne se considèrent pas comme une population à risque.
« Quand les enquêteurs appellent, certains répondent “Foutez-moi la paix !” », regrette Olivier Véran. « Les gens refusent parfois de nous donner leurs contacts en se réfugiant derrière le fait que ce n’est pas une obligation, confirme Sébastien Debeaumont. Ou bien nous disent qu’ils ont eu peu ou pas de contacts, ce qui nous interpelle. »
Les autorités s’inquiètent particulièrement des conséquences de cette attitude pour les seniors. « Le virus circule quatre fois plus chez les moins de 40 ans que chez les plus de 65 ans. » Mais, « si la circulation du virus s’accélère encore chez les plus jeunes, ils pourraient contaminer les personnes âgées, qui contractent plus souvent des formes plus graves de la maladie », avertit Olivier Véran.
Dans les Bouches-du-Rhône, un des huit départements où le niveau de vulnérabilité est élevé, « le passage entre les publics se fait déjà », souligne-t-il. Depuis trois semaines les tests positifs augmentent chez les seniors, ainsi que le nombre d’hospitalisations en réanimation. Une situation qui guette toute la France si les indicateurs ne s’améliorent pas rapidement.