Au procès des attentats du 13-Novembre, les paradoxes de Salah Abdeslam : « Je ne suis pas un danger pour la société »
2022-02-11 05:25:44
Le seul membre encore en vie des commandos a clairement laissé entendre qu’il avait renoncé à se faire exploser. Défenseur d’un islam rigoriste dont il ne respecte aucun principe, il a étalé toutes ses ambivalences.
Tiraillé entre l’Orient et l’Occident, la Syrie et la Belgique, la charia (loi islamique) et la fête, la figure du combattant et celle du déserteur, Salah Abdeslam est un homme plein de contradictions. Chemise blanche soigneusement repassée, le seul membre encore en vie des commandos des attentats du 13-Novembre s’est longuement prêté au jeu des questions pour son premier interrogatoire sur le fond, mercredi 9 février, avec patience et politesse, à mille lieues de l’accusé éruptif qui explosait dans le box au début du procès.
Jeudi 3 février, un travailleur social belge entendu comme témoin avait décrit devant la cour d’assises spéciale de Paris un des signes les plus visibles de la radicalisation : une « polarisation de la pensée » structurant le réel en oppositions irréconciliables (« eux contre nous », « bourreaux contre victimes »…). Au regard de ce symptôme, Salah Abdeslam est apparu, au fil de ces sept heures d’interrogatoire, comme un cas d’école de radicalité mal digérée, incapable de résoudre les conflits que cette approche clivante du monde soulève en lui.
Sa première ambivalence découle de son échec le soir des attentats. Seul des dix kamikazes à n’être pas passé à l’acte, il avait abandonné sa ceinture explosive avant de s’enfuir. Ecartelé entre l’image qu’il veut garder de lui-même et sa version des faits, Salah Abdeslam s’est évertué à endosser une armure trop grande pour lui, celle de « combattant de l’Etat islamique » (EI), tout en se présentant comme un déserteur. Dans une déclaration spontanée inattendue sur le sens de la peine, il a clairement laissé entendre qu’il avait renoncé à se faire exploser le 13 novembre 2015.