Brétigny-sur-Orge : à la barre, Guillaume Pepy reconnaît la « responsabilité morale infinie » de la SNCF dans l’accident ferroviaire
2022-05-01 11:29:36
L’ex-patron de la compagnie ferroviaire a été entendu comme témoin, jeudi 28 avril, lors du procès du déraillement d’un train qui a fait sept morts en 2013. Il conteste les expertises judiciaires et penche pour la thèse d’un « défaut métallurgique » comme cause de la catastrophe.
C’est à un exercice d’équilibriste que s’est livré, durant quatre heures, Guillaume Pepy devant le tribunal correctionnel d’Evry (Essonne).
Sous le feu roulant des avocats des parties civiles, l’ex-patron de la SNCF (2008-2019) a été entendu comme témoin, jeudi 28 avril, au quatrième jour du procès de l’accident ferroviaire de Brétigny-sur-Orge (Essonne), qui a coûté la vie, en juillet 2013, à sept personnes et fait plusieurs centaines de blessés.
Droit comme un « i », costume sombre, l’ex-dirigeant de 63 ans a reconnu, à la barre, « la responsabilité morale infinie » de la SNCF, jugée jusqu’au 17 juin, à l’instar de SNCF Réseau et d’un ex-dirigeant de proximité, pour « homicides involontaires » et « blessures involontaires ».
Ses notes posées sur le pupitre, M. Pepy assure ne pas avoir « d’opinion personnelle » sur la « responsabilité pénale » de la SNCF ou sur « la qualité de travail de telle ou telle personne sur le site de Brétigny », à propos duquel il n’aurait reçu « aucun signalement ou information spécifique » avant l’accident.
« Plus facile d’incriminer le matériel que les hommes »
La voix éraillée, l’ex-numéro un de la SNCF raconte s’être rendu sur les lieux du drame « en mototaxi », le 12 juillet 2013, et avoir inspecté le tronçon à l’origine du déraillement du train Paris-Limoges à la vitesse de 137 km/heure. Devant la cour, il regrette avoir déclaré d’emblée, « en pleine confusion », que la catastrophe avait été causée par un « problème de maintenance » .
« J’ai acquis la conviction, au fur et à mesure de l’enquête, que la traçabilité n’était pas bien faite à Brétigny, que l’organisation de la maintenance n’était pas optimale.
Mais ce sont des éléments regrettables de contexte. Ces défauts de travail ne remplacent pas une vérité technique, l’arbre des causes robustes et scientifiques », développe-t-il.
Pour expliquer cet « accident inédit en France en cent cinquante ans d’histoire ferroviaire », M. Pepy penche plutôt pour la « thèse » soutenue par les experts mandatés par la SNCF. A savoir une « avarie par défaut métallurgique » susceptible d’être à l’origine du « retournement et du désassemblage de l’éclisse », cette pièce métallique qui assure la jonction entre deux rails.
Contrairement aux experts judiciaires, qui ont évoqué des manquements sur le plan de la maintenance, M. Pepy donne du crédit au « scénario alternatif » bâti par les ingénieurs « rémunérés » par la SNCF.
« Sept des plus grands experts ingénieurs ferroviaires mandatés par la SNCF, des sachants qui n’ont aucune raison de mentir, ne croient pas à la cinétique de l’appareil de voie proposée, à la thèse d’un défaut d’entretien et de surveillance, argue-t-il. Et ce d’autant plus que la surveillance a été effectuée dans des conditions discutées par un jeune professionnel compétent, que cet appareil de voie n’était pas perdu dans la brousse, a été visité par des experts techniques nationaux, et avait fait l’objet d’examens. »