La « légitime défense » des policiers, un sujet brûlant qui revient dans le débat
2022-05-10 14:42:13
Depuis une évolution législative de 2017, les fonctionnaires utilisent plus souvent leurs armes. Plusieurs syndicats revendiquent désormais une « présomption de légitime défense », pour éviter les mises en examen, comme celle du policier qui a récemment tué deux personnes sur le Pont-Neuf, à Paris.
Refus d’obtempérer, tirs de policier, victimes, suites judiciaires, colère et manifestations de syndicats policiers : le scénario se répète à l’identique, depuis des années. Et la mise en examen pour « homicide volontaire », le 28 avril, de Quentin L., un gardien de la paix de 24 ans affecté à la compagnie de sécurisation de la Cité, une unité de la Préfecture de police de Paris, a relancé le débat sur l’instauration d’un principe de « présomption de légitime défense » en faveur des membres des forces de l’ordre.
Quatre jours plus tôt, peu après la proclamation des résultats du second tour de l’élection présidentielle qui a vu la réélection d’Emmanuel Macron, le jeune policier avait tiré sur une Volkswagen Polo qui fonçait sur son équipage de cinq fonctionnaires près du Pont-Neuf, à Paris. Une dizaine de tirs de HK G36, le fusil d’assaut en dotation dans la police, avaient causé la mort de deux frères âgés de 25 et 31 ans et blessé une troisième personne.
La mise en examen du gardien de la paix pour « homicide volontaire », une décision « parfaitement logique et justifiée », selon Me Bérénice Hahn de Bykhovetz, avocate de la famille des deux victimes, a sans surprise suscité la vive colère des policiers. Lundi 2 mai, près de 500 d’entre eux s’étaient réunis place Saint-Michel, dans le 6e arrondissement de Paris, à quelques dizaines de mètres de l’ancien palais de justice. « Le problème de la police reste la justice », avait alors lancé à la foule Fabien Vanhemelryck, secrétaire national du syndicat Alliance, à l’origine de l’appel au rassemblement. « Légitime défense et présomption de légitime défense : c’est ce que nous réclamons depuis plus de dix ans face à une société ultraviolente », avait-il ajouté.
Au cours de la campagne présidentielle, tous les candidats de droite et d’extrême droite ont fait figurer cette idée dans le volet sécuritaire. Le président de la République, Emmanuel Macron, lui, s’est dit « intraitable » sur la question, « sinon c’est le Far West ».
Le sujet épouse les formes prévisibles de toute réforme sécuritaire depuis plus d’un demi-siècle et l’adoption de la « loi anticasseurs » de 1970 : un fait divers, un mouvement de colère des policiers, un débat public suivi – souvent mais pas toujours – de textes brouillons et rédigés à la hâte.