« Parents confinés : attention à la tyrannie pédagogique ! »
2020-03-24 07:41:04
La période de confinement en famille fait courir le risque d’une « surcharge scolaire » pour les enfants dont les parents « tente de remplacer maladroitement leurs enseignants », alerte Benoît Urgelli, chercheur en science de l’éducation et administrateur de la FCPE du Rhône.
A la suite de la fermeture de toutes les écoles françaises vendredi 13 mars, le ministère de l’éducation nationale a engagé les équipes enseignantes dans un effort de continuité pédagogique. Mardi 17, au lendemain de l’annonce du confinement général de la population, les premières interrogations parentales se sont exprimées sur cette demande de coéducation à grande échelle.
Des parents désemparés ont signalé leurs inquiétudes sur la capacité à accompagner leurs enfants, et à assurer la continuité des apprentissages scolaires au domicile. A l’image de Nouzha, maman de deux enfants en primaire dans le 8e arrondissement de Lyon. Il est, nous résumait-elle lorsqu’on l’a rencontré, « très difficile de continuer à faire l’école à la maison. Si on ne le fait pas, on a peur que notre enfant oublie les règles de grammaire, de conjugaison. Apprendre, se concentrer, tout en étant coincé à la maison, les conditions ne sont pas optimales. D’autant plus que nous, parents, nous sommes limités dans les savoirs scolaires. »
Pour comprendre les interrogations de ces parents et les marges de manœuvre pour faciliter cette coéducation confinée, nous nous sommes tournés vers l’un de nos terrains de recherche, les parents dits unschooling, habitués aux apprentissages autonomes et à l’instruction en famille. Nous avons également contacté des parents en Italie qui ont quelques réflexions d’avance face au confinement.
Les risques du confinement pédagogique en famille
Ce rapide tour d’horizon de leurs témoignages nous apprend que la situation nécessite avant tout un temps d’adaptation, et beaucoup de confiance. Mais qu’elle comporte également des risques. Il faut d’abord éviter l’isolement et le refuge sur les écrans, que ce soient pour les enfants ou pour leurs parents. L’absence des camarades de classe peut être compensée en offrant de petites sessions de visioconférence entre enfants, et en autonomie s’ils le désirent. Les moments en « mode avion » sont importants. Tout autant que l’ennui, vecteur d’apprentissages par l’observation et l’imagination.
Concernant l’accompagnement scolaire, les parents confinés insistent énormément sur le risque de « tyrannie pédagogique ». Cette forme de violence éducative se manifeste lorsque les parents se sentent obligés de trop « jouer à la maîtresse », ce qui rajoute une pression supplémentaire dans l’organisation du quotidien à domicile, et brouillent les repères des enfants. Dans ce contexte, certains parents, plus ou moins consciemment, voyant leurs enfants en difficulté, et étant parfois eux-mêmes mal à l’aise par rapport aux contenus et aux méthodes pédagogiques, culpabilisent et perdent patience.