Au Soudan du Sud, la guerre sans fin des éleveurs surarmés
2020-02-15 13:31:43
Dans le centre du pays, où se côtoient différents clans dinka, les violences sont récurrentes et deviennent de plus en plus meurtrières.
Malgré les risques d’attaques, les bergers sont venus. Depuis les « cattle camps » éparpillés des kilomètres à la ronde, ils ont convergé vers le village de Maper, pour bénéficier de la campagne de vaccination du bétail conduite par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR). C’est la quatrième année consécutive que ce programme a lieu à Rumbek North, région centrale du Soudan du Sud où se côtoient différents clans dinka.
Ici, il n’y a ni réseau téléphonique, ni radio, ni télévision, ni journaux. La route qui relie Maper à Rumbek, la capitale régionale à 100 kilomètres au sud, est impraticable à cause des pluies la moitié de l’année. Et à quelques kilomètres au nord, on arrive en territoire nuer, sous contrôle de l’opposition armée dirigée par l’ancien vice-président Riek Machar, un Nuer, principal opposant au président Salva Kiir, un Dinka, dans la guerre civile qui a éclaté en décembre 2013. Les populations de Rumbek North, isolées, survivent grâce au bétail, surtout lorsque les inondations et la violence réduisent les récoltes à peau de chagrin, comme cela a été le cas fin 2019.
Fin novembre, des combats ont éclaté entre le clan de Maper et celui du village voisin, Malueeth. Trois jours de violence qui ont fait 79 morts et 101 blessés. Le CICR a même évacué ses employés par hélicoptère ainsi que 29 blessés graves pour les soigner à l’hôpital militaire de Juba, la capitale du pays. C’est seulement deux mois plus tard, fin janvier, que l’organisation a pu reprendre la vaccination, les formations aux premiers secours et au respect des droits de base à destination des « Gelweng », les « protecteurs du bétail » en dinka.
Ces jeunes hommes ont un look très travaillé. Cheveux décolorés par l’application d’une mixture de cendres et d’urine de vache, ils sont coiffés d’une plume ou d’un foulard rouge en signe de danger, portent un bracelet d’ivoire et d’autres amulettes de protection autour des poignets. Ils portent aussi un AK-47 en bandoulière et n’hésitent pas à s’en servir pour défendre leur « cattle camp » ou venger l’un des leurs.