Après les tensions, Washington va réduire ses troupes en Irak dans les «prochains mois»

  • 2020-06-13 20:43:46
Les États-Unis ont annoncé ce jeudi 11 juin qu'ils allaient « réduire » leur présence militaire en Irak. La veille, les deux pays avaient entamé un « dialogue stratégique ». Une façon pour les Américains de reprendre langue avec un gouvernement irakien désormais dirigé par un Premier ministre plus favorable à Washington, au terme de mois de tensions. Ce devait être une réunion de deux jours à Bagdad mais la crise sanitaire en a décidé autrement. Les premiers pourparlers entre les États-Unis et l'Irak depuis une décennie, se sont déroulés en deux heures par vidéoconférence. Personne ne s'attendait à des résultats concrets à la suite de cette première journée, rappelle notre correspondante à Bagdad, Lucille Wassermann. Mais le ton y a été donné : évoquant les « progrès significatifs » contre le groupe jihadiste État islamique (EI), raison de la présence américaine à la tête d'une coalition internationale, Américains et Irakiens ont affirmé dans une déclaration conjointe que « les États-Unis continueraient à réduire leurs forces en Irak ». Questions en supens Aucun calendrier n'a été communiqué. Aucun chiffre, non plus, concernant les coupes attendues parmi les 5 200 militaires américains présents en Irak. À Bagdad, certains y voient le début d'un retrait progressif, d'autres un simple effet d'annonce, car le groupe État islamique reprend de la vigueur dans le pays, et les troupes de la coalition restent indispensables pour contenir la menace. La question aujourd'hui est donc de savoir quand et combien de militaires américains partiront, et surtout, quel statut auront les troupes restantes, même si les États-Unis ont déjà souligné qu'ils ne recherchaient pas une « présence permanente ». Une position en ligne avec la volonté de désengagement du président Donald Trump, qui a promis de « mettre fin aux guerres sans fin ». Mise à jour du dialogue de 2008 Cette déclaration a été faite à l'issue d'un « dialogue stratégique » par visioconférence en raison du Covid-19. Son objectif : ramener un peu de stabilité dans les relations houleuses entre les deux alliés. Une mise à jour du « dialogue » de 2008, quand les États-Unis avaient établi les conditions de leur départ après avoir envahi l'Irak. Depuis, leurs troupes sont revenues, bien moins nombreuses, contre l'EI. Plus de deux ans et demi après la « victoire » sur les jihadistes côté irakien, les milliers de soldats américains dans le pays -- 5 200 en début d'année -- étaient à nouveau au cœur des tensions. Sentiment anti-américain Le sentiment anti-américain a en effet flambé avec la mort en janvier du général iranien Qassem Soleimani et de son lieutenant irakien, tués à Bagdad dans un raid ordonné par le président Donald Trump. Une décision prise en réaction à la multiplication de tirs de roquettes contre des intérêts américains, attribués par Washington aux forces pro-Iran. Dans la foulée, les députés chiites ont voté l'expulsion des soldats étrangers. À Bagdad, un nouveau Premier ministre est toutefois arrivé. L'ex-chef du renseignement Moustafa al-Kazimi, qui passe pour proche des Américains et de ses alliés arabes, a changé la donne. L'homme a pris les rênes d'un pays en pleine crise économique et qui réclame toujours justice pour quelque 550 manifestants tués dans la répression d'une révolte inédite. Réduction drastique improbable Cependant, une réduction drastique des troupes américaines paraît hautement improbable tant la menace jihadiste reste présente, font valoir les autres pays de la coalition. Les factions irakiennes proches de l'Iran, qui ont mené en janvier le vote au Parlement pour demander leur départ, s'impatientent et donnent 6 mois à Washington. De nouveau, lundi et mercredi, deux roquettes ont visé soldats et diplomates américains à Bagdad, comme un rappel. Le ton est toutefois moins agressif. Les brigades du Hezbollah, faction pro-Iran la plus radicale, ont annoncé qu'elles ne donneraient leur position qu'après jeudi. Aide économique américaine Les pourparlers, dont ces factions ne font pas partie, se dérouleront sur plusieurs mois. Outre la sécurité et le contre-terrorisme, les deux délégations abordent les questions politiques, économiques et culturelles. « Cette mise en retrait donne plus de marge de manœuvre à M. Kazimi et aux Américains », a affirmé à l'AFP Robert Ford, du cercle de réflexion Middle East Institute. D'autant que le gouvernement irakien « s'est engagé à protéger le personnel militaire de la coalition internationale », selon la déclaration conjointe. En échange, Washington a promis de favoriser une aide économique à Bagdad.

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