Le général François Lecointre : « Une armée n’est pas faite que pour la gestion de crise »
2020-07-14 22:28:37
Le chef d’état-major des armées fait le point sur l’état des forces françaises engagées dans les opérations extérieures.
Epidémie de coronavirus oblige, c’est un défilé du 14-Juillet amputé de ses blindés, avec deux fois moins de participants et sans son public que devait présider Emmanuel Macron, place de la Concorde. La France a pourtant, cette année, continué de déployer intensément ses armées : au Sahel, où sa principale opération extérieure, « Barkhane », a été poussée à 5 100 hommes face à l’organisation Etat islamique dans le grand Sahara, en Méditerranée, où les tensions ont explosé sous le jeu des puissances, ou dans l’espace de l’OTAN, pour faire face aux pressions russes. Le général François Lecointre, chef d’état-major des armées, répond au Monde.
Ce 14-Juillet exceptionnel honore les militaires qui ont participé à la lutte contre le coronavirus, pas ceux des opérations extérieures malgré une année très dense. Est-ce un problème ?
La mise en avant de ceux qui ont été en « opex » n’est pas systématique, même si toutes les formations des armées participent désormais en permanence aux engagements maritimes, aériens, terrestres, extérieurs. Pour moi, les opex ne sont pas la finalité du 14-Juillet, dont les thèmes varient selon les années. La cérémonie marque un hommage du pays à ses armées. C’est aussi la France qui, de façon assumée, montre sa puissance, sa force, la volonté de défendre ses intérêts et les causes qu’elle porte.
Le président a salué l’apport « des militaires lors de la crise sanitaire – « Cela rassure » –, tout en disant : « N’oublions pas nos opex, la France est regardée partout ». Qu’est-ce qui est regardé ?
Il était important que les armées soient engagées dans la lutte contre le Covid. Mais notre première obsession a été de poursuivre nos missions de combat. Au moment où d’autres nations et des organisations internationales gelaient leur action pour affronter la crise sanitaire, le président voulait que la France reste plus que jamais présente, pour manifester qu’elle est un partenaire fiable. Nous avons continué sur le tempo prévu, or celui-ci augmentait déjà face à l’aggravation de la situation internationale. La rapidité de la dégradation est frappante.
Nous avons renforcé nos engagements dans nos zones d’intérêt immédiat, en Afrique, au large de la Libye avec l’opération « Irini », dans le canal de Syrie [le long des côtes syriennes] et au Levant, où des frappes importantes ont eu lieu ces dernières semaines, dans le détroit d’Ormuz avec la mission de surveillance Agenor. En Afrique, cela a été l’occasion de marquer des points.