« En l’absence de concurrents étrangers, les pionniers numériques chinois jouissent d’une liberté impressionnante »

  • 2020-10-04 14:57:00
La chercheuse Isabelle Feng souligne, dans une tribune au « Monde », les particularités du modèle économique des plates-formes chinoises, fermement encadrées mais aussi choyées par Pékin. Tribune. L’interdiction de l’application chinoise WeChat sur le sol américain, décrétée par l’administration Trump (« WeChat ban »), pourrait ne pas avoir lieu. En invoquant la liberté d’expression garantie par la Constitution, une juge de San Francisco s’est prononcée, le 20 septembre, en faveur d’un groupe d’utilisateurs de la messagerie instantanée chinoise. Nous vivons une bien curieuse époque : pour défendre un outil de communication soumis à la censure de la Chine totalitaire, il faut puiser dans la liberté d’expression garantie par la Constitution américaine… Toutefois, plutôt qu’un nouveau revers infligé au locataire de la Maison Blanche, l’épisode « WeChat ban » met en évidence ce qu’il y a de meilleur dans la démocratie américaine : l’indépendance du juge vis-à-vis de l’exécutif et le respect de la procédure judiciaire, car le verdict de la juge californienne n’est que le début d’une longue bataille judiciaire à venir quand on songe au « Muslim ban » qui, tant décrié, fut finalement approuvé par la Cour suprême. D’ailleurs, rien n’indique que WeChat, regroupant plus d’un milliard d’utilisateurs, dont 7 % se trouvent au-delà des frontières chinoises, pourrait poursuivre son rêve américain, tout en maintenant le même mode de fonctionnement qui lui a assuré le succès dans son pays d’origine, à savoir collectionner des données sans encadrement effectif et censurer la liberté d’expression en ligne sous la dictée du Parti communiste chinois.

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