« Les traités européens n’autorisent en aucun cas l’Union à s’endetter »

  • 2020-10-12 14:56:34
Le professeur de finances Markus C. Kerber et l’ancien banquier Jean-Michel Naulot soulignent, dans une tribune au « Monde », que l’absence de base juridique à l’emprunt européen pour le plan de relance devra conduire à une révision des traités. Tribune. Le débat autour du plan de soutien de 750 milliards d’euros (« Next Generation EU ») ne fait que commencer. La question de la rationalité des aides et surtout de leur conditionnalité reste ouverte. La nécessité de dégager de nouvelles ressources provoque de vives discussions. Mais un point jusqu’à présent passé sous silence est particulièrement problématique : on cherche en vain les fondements juridiques de l’accord du 21 juillet. Un « viol nécessaire des règles des traités » Certes, la légalité des subventions en cas de crise majeure ne fait pas de doute. Dès le mois d’avril, Angela Merkel avait précisé que l’article 122 du traité de fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) s’applique à la crise pandémique. Selon cet article, une assistance financière est possible lorsqu’un Etat connaît de graves difficultés en raison de « catastrophes naturelles ou d’événements exceptionnels échappant à son contrôle ». En revanche, la légalité de l’emprunt, et non des subventions, n’a jamais été abordée. Or, l’emprunt de 750 milliards de l’Union européenne est absolument considérable au regard des opérations précédentes. Les fonds levés en 2010 par l’Union européenne (UE) avec le mécanisme européen de stabilité financière (MESF), en faveur de l’Irlande et du Portugal, ne représentaient qu’une cinquantaine de milliards. A ces 750 milliards d’euros, il faut ajouter 100 milliards qui seront levés par la Commission à partir de la mi-octobre afin de financer le plan « SURE » (soutien au chômage partiel). La Commission inscrit ces nouveaux emprunts dans le prolongement des opérations de 2010, peut-être pour convaincre que le recours à l’emprunt est devenu naturel. A l’intention des investisseurs, elle invoque l’article 323 du TFUE qui énonce que « le Parlement européen, le Conseil et la Commission veillent à la disponibilité des moyens financiers permettant à l’Union de remplir ses obligations juridiques à l’égard des tiers ». Gérer les finances de l’Union avec responsabilité est bien une obligation de la Commission, mais ce n’est en aucun cas une autorisation d’endetter l’Union.

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