Haut-Karabakh : « La poursuite des responsables de crimes de guerre ne saurait être évitée »

  • 2020-12-09 12:07:24
Dans une tribune au « Monde », la juriste Sévane Garibian analyse le rôle majeur de la Turquie dans le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Selon la chercheuse, la reconnaissance du Haut-Karabakh pourrait être le moyen le plus sûr de garantir la sécurité de la population arménienne. Tribune. Les termes de l’accord de cessez-le-feu dans le Haut-Karabakh signé le 10 novembre marquent cyniquement la victoire de Poutine, ainsi qu’en partie celle d’Erdogan, dont le rôle majeur dans ce conflit à forces inégales n’est plus à rappeler. On le sait, l’idéologie panturquiste fonde sa politique menée, avant même le Caucase, en Syrie, en Libye et en Méditerranée orientale. Erdogan avait en outre appelé à terminer la mission exterminatrice entreprise par ses aïeux ottomans, à en finir avec les « restes de l’épée » (les descendants des rescapés du génocide des Arméniens de 1915). « J’avais dit qu’on chasserait les Arméniens de nos terres comme des chiens, et nous l’avons fait », déclare pour sa part le président de l’Azerbaïdjan, Ilham Aliev, juste après la signature de l’accord. Ces propos se font l’écho d’une propagande haineuse, anti-arménienne, à l’œuvre en Turquie et en Azerbaïdjan, deux Etats qui se décrivent mutuellement comme « une seule nation » et dont le premier est doté de la deuxième armée [en effectifs] de l’OTAN. Si elle n’est pas nouvelle, cette propagande devient d’autant plus inquiétante qu’elle s’appuie sur un discours reproduisant la rhétorique ayant conduit au génocide des Arméniens, comme l’explique l’historien et politologue spécialiste de la Turquie Hamit Bozarslan. Sans compter qu’elle est relayée, en Europe, par les Loups gris, organisation armée ultranationaliste et néofasciste turque qui vient d’être dissoute en France après des violences visant la communauté arménienne. Ironie de l’histoire Au-delà du cynisme politique, l’ironie de l’histoire. C’est en effet au cœur de la question d’Orient, dont la question arménienne est un « sous-produit », que se consolide au XIXe siècle la pratique de l’intervention dite pour cause d’humanité, ancêtre d’un principe désormais consacré en droit international : la responsabilité de protéger. Cette responsabilité implique un devoir de protection des populations civiles qui incombe à chaque Etat ou, subsidiairement, à la communauté internationale en cas de défaillance manifeste de celui-ci.  

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