Loi Climat : « La majorité utilise-t-elle, oui ou non, le motif d’irrecevabilité des amendements pour museler les oppositions ? »

  • 2021-03-31 11:58:32
Plusieurs amendements au projet de loi Climat et résilience ont été jugés irrecevables alors même qu’ils reprenaient des propositions de la convention citoyenne sur le climat s’indignent, dans une tribune au « Monde », les quatre députés Nouveaux Démocrates Delphine Bagarry, Emilie Cariou, Guillaume Chiche et Aurélien Taché. Tribune. Le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et le renforcement de la résilience face à ses effets ravive la controverse autour du cavalier législatif et de son utilisation. Un amendement est considéré comme cavalier dès lors qu’il introduirait des mesures sans lien, même indirect, avec le sujet dont traite le projet de loi ou la proposition de loi en cours de discussion. Des amendements, portant sur l’écoresponsabilité des entreprises ou encore sur l’adoption, par la France, de l’objectif européen de réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030, ont été déclarés irrecevables pour ce motif. Ils reprennent pourtant directement des propositions de la convention citoyenne pour le climat, dont ce projet de loi est censé être la traduction concrète. L’absence de lien, même indirect, avec le texte, apparaît alors peu justifiable. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que le sujet relatif aux amendements déclarés irrecevables au titre de l’article 45 de la Constitution, car ne présentant pas de lien, même indirect, avec le texte, provoque des débats houleux dans notre chambre. Des craintes, justifiées, s’expriment quant à l’utilisation abusive de cet outil de contrôle par la majorité. Cette polémique sur le musellement des oppositions est, de surcroît, largement alimentée par le choix discutable d’imposer un temps législatif programmé sur des textes majeurs. Et si les oppositions crient au scandale démocratique, un débat de fond n’en est pas moins légitime. D’abord parce qu’il touche à l’une des missions essentielles du Parlement, celle de faire la loi. Ensuite parce qu’il est révélateur d’un effet de bord délétère de la réforme de l’internalisation du contrôle a priori par l’Assemblée nationale de la recevabilité des amendements. Opacité des arbitrages Lorsque l’on s’en tient aux chiffres, la proportion d’amendements irrecevables, car considérés comme des cavaliers législatifs, est sensiblement la même pour la majorité que pour les groupes d’opposition. Mais le fait est que, au sein de ces amendements, l’absence de lien, même indirect, avec le texte est discutable. L’article 45 de la Constitution dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ». Le règlement de l’Assemblée nationale – réformé par Richard Ferrand en 2019, qui a fait sienne cette doctrine dans son article 98 alinéa 6 – poursuivait un objectif clair dans un souci d’« efficacité » chère à La République en marche : réduire la durée des débats en séance et juguler l’inflation du nombre d’amendements déposés.  

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