Succession à Sciences Po : « Quelles leçons retenir de cette tragi-comédie ? »

  • 2021-04-13 13:11:37
Dans une tribune au « Monde », l’économiste Romain Rancière, dont la candidature à la présidence de la Fondation nationale des sciences politiques a été rejetée, relate les péripéties d’une procédure qui, loin de redorer l’image de l’école, l’a ternie. Tribune. Après la démission d’Olivier Duhamel, le 4 janvier, l’enjeu pour Sciences Po est de choisir un nouveau président qui puisse à la fois ramener le calme dans une maison meurtrie, mais aussi sortir des pratiques de l’entre-soi et conforter la mue de cette école en une université internationale de recherche. Cela doit se faire selon une procédure irréprochable du point de vue de la gouvernance, de la transparence, et de l’éthique. A cette fin, le conseil d’administration de Sciences Po met en place un comité de recherche afin d’identifier des candidats au renouvellement de sa présidence. Il s’agit là d’une procédure classique pour les recrutements internationaux dans le monde académique et au-delà. Le rôle d’un tel comité est avant tout de conseil. Il suscite des candidatures et soumet une liste courte de trois à quatre noms à l’autorité qui vote, ici le conseil d’administration. Règles déontologiques Non statutaires, ces comités de recherche sont néanmoins soumis à des règles déontologiques visant à éviter tout conflit d’intérêts. Une règle absolue est que leurs membres ne peuvent pas se déclarer eux-mêmes candidats à aucun moment du processus.La procédure se déroule au départ normalement. Les trois candidats – Nonna Mayer, Pascal Perrineau et moi-même – sont auditionnés par le comité sur leur projet. J’insiste sur l’intérêt d’adosser à Sciences Po un pôle d’ingénierie qui permette de faire des programmes joints entre sciences sociales et science des données, et d’avoir une approche plus riche sur les questions d’environnement et de développement des territoires. Je suggère également l’ouverture d’un vaste campus de Sciences Po en Afrique. Je m’attends à ce que nos trois candidatures soient présentées au conseil d’administration, suscitant alors un débat sur les avantages de faire venir un externe à la tête de Sciences Po apportant un regard international ou de privilégier un interne connaissant mieux les arcanes de la maison. Mais cela ne s’est passé pas ainsi. Le jour du débat au conseil d’administration, il n’y a curieusement plus qu’une seule candidate unique officielle, Nonna Mayer, qui sera battue. Quelques heures plus tard, un membre du comité de recherche m’appelle pour me dire que ma candidature a été écartée en amont en raison de trois « handicaps » : mon sexe, mon âge, et mon absence de liens historiques avec Sciences Po.

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