« Agir contre le dérèglement du climat devrait être un élément central de la stratégie de toute banque centrale »

  • 2021-09-23 16:00:34
L’ONG Reclaim Finance souligne une contradiction certaine entre le discours de la Banque de France, qui se veut à la pointe du combat contre le réchauffement climatique, et son soutien financier constant accordé aux énergies fossiles, note, dans une tribune au « Monde », Paul Schreiber. Tribune. Si les banques centrales sont de plus en plus nombreuses à se pencher sur la question climatique, elles se refusent toujours à mettre en place des mesures qui contribueront à la transition écologique. La Banque centrale européenne (BCE) est emblématique de ce paradoxe. Après des décennies d’immobilisme, elle a formellement reconnu l’importance des enjeux climatiques et la nécessité d’intégrer ceux-ci dans sa stratégie monétaire pour remplir ses missions. Un premier pas qui fait écho à l’appel de plus de 170 000 Européens, sans pour autant y répondre. En effet, les mesures présentées par la banque ne mettent pas fin à ses soutiens aux grands pollueurs, ni ne participent à l’atteinte des objectifs climatiques de l’Union européenne (UE), et prendront plusieurs années à entrer en vigueur. Les centaines de milliards d’achats d’actifs de l’Eurosystème continueront à soutenir les entreprises les plus polluantes et leurs nouveaux projets d’énergies fossiles, pendant au moins un an et demi. La Banque de France se dit moins dans les énergies fossiles… Les banques privées pourront quant à elles se financer en déposant ces mêmes actifs auprès de la BCE. On est donc bien loin de la BCE « pionnière dans la lutte contre le changement climatique » que nous promettait le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, en décembre 2020. Concrètement, la nouvelle « feuille de route » de la BCE repousse l’action à plus tard, gaspillant de précieuses années alors même que le réchauffement climatique s’aggrave, passant du statut d’urgence à celui de « code rouge » pour l’humanité. Pourtant, les données du problème sont claires. Selon les Nations unies, il faut réduire les émissions de CO2 de 7,8 % par an d’ici à 2030 pour limiter le réchauffement à 1,5 °C. Cette réduction implique une diminution drastique de la production d’énergies fossiles, à hauteur de 6 % par an d’ici à 2030, et, comme le rappelle l’Agence internationale de l’énergie, la fin des investissements dans de nouveaux projets fossiles. L’UE, responsable d’une part importante des émissions historiques, se doit d’aller plus vite et plus loin pour lutter contre le changement climatique et s’est engagée à réduire ses émissions d’au moins 55 % d’ici à 2030. La Banque de France n’ignore pas cette réalité. En janvier, elle a considérablement restreint ses investissements dans les énergies fossiles et s’est engagée à s’opposer – en tant qu’actionnaire – à tout nouveau projet.

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