Allongement des délais d’IVG en France : « Mettons fin à une violence sexiste qui ne dit pas son nom »
2021-12-06 16:21:07
Pauline Diaz, directrice d’une plate-forme diffusant de l’information sur l’avortement, estime, dans une tribune au « Monde », que la proposition de loi visant à étendre le délai légal pour la pratique d’une IVG est source d’émancipation pour les femmes, elle doit être adoptée pour cette raison.
Tribune. A la fin du premier confinement, les demandes d’interrruption volontaire de grossesse (IVG) ont explosé, exposant la problématique d’un délai légal de seulement douze semaines. La députée Albane Gaillot (ex-La République en marche) et la sénatrice Laurence Rossignol (SOC) , soutenues par de nombreuses associations, déposent alors une proposition de loi pour étendre le délai légal. Face à une forte opposition de droite, cette proposition est retirée en février 2021, mais, grâce à la ténacité des mouvements féministes et des parlementaires portant la proposition, elle est de nouveau à l’ordre du jour.
Les violences sexistes et sexuelles sont plus facilement reconnaissables comme des actes commis, en grande majorité à l’encontre des femmes, avec force ou contrainte, mais elles peuvent aussi prendre la forme d’une « privation de ressources ou d’accès à des services ». En 2015, les experts de l’ONU rapportaient que « la criminalisation ou tout autre manquement à fournir des services dont seules les femmes ont besoin, tels que l’avortement et la contraception d’urgence, constitue une discrimination fondée sur le sexe ».
De plus, elle entrave cinq droits humains fondamentaux : le droit à la santé, le droit à la vie, le droit de ne pas être discriminé, le droit de n’être ni torturé ni traité de façon inhumaine, et le droit à la vie privée.
En limitant l’avortement sur demande aux douze premières semaines de grossesse, la France discrimine toutes les personnes susceptibles de tomber enceinte qui auraient besoin d’accéder à un avortement au-delà de ce délai.
Des situations plus difficiles à cause des confinements
Dans un contexte de pandémie mondiale où l’accès aux soins de santé s’est fait plus difficile dû aux multiples confinements et à la pression exercée sur les structures de santé, les femmes ont beaucoup plus de difficultés à obtenir des IVG légales dans les délais et sont souvent obligées de voyager dans d’autres pays européens.
La proposition de loi, discutée depuis le début de la semaine, se concentre sur trois axes principaux : l’allongement des délais à quatorze semaines, la suppression de la double clause de conscience des professionnels de santé, et l’autorisation pour les sages-femmes de pratiquer des IVG chirurgicales.
Afin de réduire les inégalités, il est indispensable d’allonger les délais, car de nombreuses barrières dites « invisibles », et qui viennent se superposer à des facteurs physiologiques et psychologiques tels que les règles irrégulières ou les dénis de grossesse, entravent l’accès de certaines personnes au service en retardant la détection des grossesses et la possibilité de prise de rendez-vous.