Législatives en Australie : victoire inattendue des conservateurs au pouvoir

  • 2019-05-18 23:53:36
Le chef de l’opposition travailliste, donné favori, a reconnu samedi sa défaite et annoncé qu’il démissionnerait de son poste de chef du parti. C’est une surprise, au point que le vainqueur lui-même a évoqué un « miracle ». Depuis 2016 et jusqu’aux derniers jours avant le vote, sondages et analystes anticipaient pour les élections australiennes une victoire des travaillistes jusqu’alors dans l’opposition. C’est au contraire le Parti libéral du premier ministre sortant, Scott Morrison, qui l’a emporté samedi 18 mai. « J’ai toujours crû aux miracles », a lancé le chef de gouvernement, comparant ce résultat à la naissance de ses deux filles, conçues naturellement après quatorze années à tenter des fécondations in vitro. « Nous sommes une nation formidable et un peuple formidable ! Que Dieu bénisse l’Australie ! » 17 millions d’Australiens étaient appelés aux urnes, dans ce pays où le vote est obligatoire. Le décompte des voix devait se poursuivre dimanche mais il est probable que le Parti libéral n’obtiendra pas la majorité de 76 sièges sur les 151 que compte le Parlement, de sorte qu’il devra certainement composer avec des députés indépendants ou d’autres formations pour former son nouveau cabinet. L’enjeu du réchauffement climatiqueParmi les sujets débattus au début de la campagne qui s’est étalée sur cinq semaines, l’enjeu du réchauffement climatique figurait en bonne place, alors que l’île est en proie aux évènements climatiques extrêmes, sécheresses notamment. Or la coalition conservatrice sortante était largement en retrait sur ce thème, au point que les émissions de gaz à effet de serre de l’Australie sont reparties à la hausse depuis quatre ans. Scott Morrison lui-même est connu pour sa proximité avec l’industrie minière, alors que l’Australie est le premier exportateur mondial de charbon. Face à lui, le travailliste Bill Shorten ambitionnait de faire de l’île une « superpuissance des énergies renouvelables ». Surtout, M. Shorten promettait « la fin du chaos » gouvernemental, référence aux querelles intestines et manœuvres qui ont entaché six années de pouvoir libéral et mené à trois changements de premiers ministres, dont la nomination de M. Morrison il y a neuf mois. Malgré ce passif, les Australiens ont préféré la garantie de stabilité économique qu’incarne le camp conservateur. Scott Morrison avait mis en garde contre une gestion des finances nationales hasardeuse et « 387 milliards de dollars d’impôts supplémentaires » si les travaillistes devaient monter au pouvoir. « Parce qu’ils ne savent pas gérer leur argent, ils vont venir chercher le vôtre » ont martelé les spots publicitaires du Parti libéral. Rôle croissant des populistesCet argumentaire a placé les travaillistes sur la défensive sur la fin de course. « Ce gouvernement vous ment à propos des impôts. Il n’a d’yeux que pour les nantis » a dû rétorquer le parti de centre gauche dans ses clips de campagne. Avec des sondages si serrés (l’institut IPSOS prédisait une victoire travailliste à 51 % la veille du scrutin), Shorten et Morrison ont dû multiplier les déplacements dans toutes les régions qui pouvaient leur apporter des voix précieuses : la Tasmanie, l’Australie de l’Ouest ou le Queensland. « Il y a un côté “on prend les mêmes et on recommence” mais cette fois Scott Morrison peut se prévaloir d’une authentique victoire électorale et non d’une révolution de Palais. Ce qui lui donne de la légitimité, de la prestance », analyse Peter Chen, chercheur en sciences politiques à l’Université de Sydney. Toutefois, avec une victoire aussi courte et de probables alliances, « le public l’aura à l’œil et Morrison n’aura pas les mains complètement libres », remarque M. Chen. Les résultats montrent par ailleurs le rôle croissant que jouent les figures populistes en Australie. Notamment l’homme d’affaires Clive Palmer, chef du parti Australie Unie souvent comparé à Donald Trump et qui a dépensé l’équivalent de 36 millions d’euros en spots télévisés et pleines pages de journaux durant la campagne et a dit qu’il était favorable à la victoire de M. Morrison, même si ce dernier a garanti qu’il ne gouvernerait pas avec lui. « Campagne toxique »Les travaillistes n’ont par ailleurs pas profité d’un « effet Bob Hawke ». Immensément populaire jusqu’à son décès deux jours avant le vote, cet ancien premier ministre travailliste était resté à la tête du gouvernement près de neuf ans, de 1983 à 1991. Sa mort a rappelé sa préférence pour le consensus plutôt que la confrontation, et ses réformes économiques qui ont permis à l’Australie de connaître une période de croissance ininterrompue depuis, malgré le ralentissement actuel. Bill Shorten a revendiqué le parrainage de M. Hawke mais Scott Morrison s’est attelé vendredi à présenter le défunt comme une figure appartenant à l’héritage national plus qu’à un camp. « Il était au-delà de la politique. Tous les Australiens pouvaient se sentir connectés à Bob Hawke » a-t-il soutenu. AFP.

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