Tokaïev élu président du Kazakhstan au cours d’un scrutin marqué par des centaines d’arrestations

  • 2019-06-09 23:13:40
Le successeur que s’est choisi l’ex-chef de l’Etat, Noursoultan Nazarbaïev, a remporté les élections présidentielles avec 70 % des voix selon les premières estimations. Le président par intérim du Kazakhstan, Kassym-Jomart Tokaïev, a remporté avec 70 % des voix, dimanche 9 juin, l’élection présidentielle anticipée de ce pays d’Asie centrale, au terme d’une journée marquée par d’importantes manifestations et plusieurs centaines d’arrestations. Kassym-Jomart Tokaïev a obtenu 70,13 % des voix, selon les sondages réalisés à la sortie des urnes par l’institut Opinion Publique. Son plus proche rival, Amirjan Kossanov, en a obtenu 15,39 %, ce qui est le meilleur score jamais réalisé par un opposant dans une élection présidentielle kazakhe. Le taux de participation s’est établi à 77,4 %, selon la Commission électorale centrale. La victoire de M. Tokaïev, un diplomate de carrière de 66 ans, ne faisait guère de doute puisqu’il était soutenu par l’ex-président Noursoultan Nazarbaïev, qui a dirigé sans partage le Kazakhstan depuis son indépendance en 1991. Mais ce scrutin a surtout été marqué par les plus importantes manifestations depuis trois ans à travers le pays, les protestataires appelant au boycott d’une élection qu’ils estimaient jouée d’avance. Plusieurs centaines de manifestants de l’opposition ont été arrêtés, comme l’a confirmé le vice-ministre kazakh de l’intérieur en communiquant le chiffre de « 500 personnes qui ont été transférées dans les commissariats de police de Nur-Sultan et d’Almaty ». « Honte ! Honte ! Honte ! »Les journalistes de l’Agence France-presse (AFP) ont vu les policiers interpeller et conduire dans des véhicules des centaines de personnes dans les deux premières villes du Kazakhstan, Almaty et la capitale Astana. L’un des correspondants de l’AFP a été brièvement interpellé avant d’être remis en liberté, tandis qu’un autre s’est vu confisquer son équipement vidéo. Deux journalistes de Radio Free Europe-Radio Liberty, Petr Trotsenko à Almaty et Saniya Toiken à Astana, ont également été interpellés, puis relâchés, ainsi que Marius Fossum, de l’organisation de défense des droits humains Comité Helsinki norvégien. Plusieurs autres journalistes ou militants politiques ont été interpellés, certains étant toujours en détention. Selon un vice-ministre de l’Intérieur, Marat Kojaïev, « environ cent » manifestants ont été appréhendés dans les deux villes. « Honte ! Honte ! Honte ! » ou encore « La police de notre côté ! », criaient certains manifestants à Almaty avant que les forces de l’ordre ne dispersent le rassemblement. Depuis la démission de Noursoultan Nazarbaïev, le Kazakhstan est traversé par une agitation sociale rare qui a provoqué un raidissement des autorités. L’opposant le plus virulent au régime, l’ancien banquier en exil Moukhtar Abliazov, avait appelé à des manifestations dimanche. Une transition politique décrite comme « une illusion »Plusieurs manifestations avaient émaillé la campagne électorale, provoquant une réponse sévère des autorités, qui ont intensifié la répression contre les médias et les opposants dans les semaines ayant précédé le vote. Dans un communiqué, l’ONG Human Right Watch (HRW) a expliqué que l’idée d’une transition politique était « une illusion » et mis en lumière la poursuite de violations des droits de l’homme sous la présidence par intérim de M. Tokaïev : « Les autorités kazakhes interrompent de façon routinière les protestations pacifiques, emmènent de force leurs participants – leur attachant parfois les mains et les pieds – et les sanctionnent en leur infligeant des amendes et de courtes peines d’emprisonnement. » Mais, même si cette journée d’élection est marquée par d’importantes manifestations, Kassym-Jomart Tokaïev, le successeur que s’est choisi l’ancien chef de l’Etat, est quasiment assuré de l’emporter en dépit de la présence de six autres candidats. M. Tokaïev, 66 ans, un ancien diplomate de carrière, affronte six adversaires mais aucun n’est connu du grand public et un seul peut être considéré comme un réel opposant. A l’inverse, le président par intérim a pu compter sur le soutien de nombreuses célébrités et sur les ressources de l’Etat, mises à sa disposition pour sa campagne électorale. Il semblera néanmoins difficile de faire aussi bien que l’ancien président kazakh, élu une première fois en 1991 puis réélu à quatre reprises avec des scores dépassant les 80 %. En 2015, dans un contexte de difficultés économiques, Noursoultan Nazarbaïev avait obtenu 98 % des voix pour un taux de participation de 95 %. Ces élections n’ont jamais été reconnues comme libres et justes par les observateurs internationaux et il est probable qu’il en sera de même pour celle-ci. Selon l’un des deux organismes de sondages autorisés à fonctionner, M. Tokaïev est crédité de près de 73 % des voix.

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