Déconfinement: le Conseil d'Etat interdit la surveillance par drones à Paris

  • 2020-05-18 19:47:07
Le Conseil d'Etat, la plus haute juridiction française, a interdit ce lundi 18 mai l'usage des drones, utilisés à Paris en dehors de tout cadre légal pour surveiller le respect des règles du déconfinement. Les appareils de la préfecture de police de Paris ne pourront plus survoler la capitale pour contrôler le respect des règles du déconfinement. Le Conseil d'Etat a ordonné ce lundi à l'Etat de cesser, « sans délai », de procéder à ces mesures de surveillance. La plus haute juridiction française était saisie en référé (en urgence) par la Ligue des droits de l'Homme (LDH) et l'association La Quadrature du Net, dont le recours avait d'abord été rejeté par le tribunal administratif de Paris. « Quand j'ai découvert que l'utilisation des drones n'était pas encadrée, les bras m'en sont tombés », a raconté à l'audience vendredi Claire Rameix, l'avocate de la Quadrature du Net. Les débats se sont concentrés sur la question du respect du droit à la vie privée et du droit à la protection des données personnelles, deux libertés fondamentales menacées par la possibilité d'identifier les personnes filmées par ces drones sur la voie publique. Le ministère de l'Intérieur et la préfecture de police ont répété que ces drones n'étaient pas utilisés à cette fin, mais pour repérer les rassemblements de plus de dix personnes afin de déployer des forces de l'ordre pour les disperser. Le représentant de la préfecture de police a cependant admis qu'il était « possible de reconnaître les gens » et « la couleur des vêtements » lorsque l'appareil vole à 80 ou 100 mètres de hauteur, ce qui est généralement le cas. « Atteinte grave et illégale au droit au respect de la vie privée » Dans son ordonnance, le juge retient ainsi les « risques d'un usage contraire aux règles de protection des données personnelles ». L'usage de ces drones, sans cadre juridique, « caractérise une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie privée », poursuit-il. La réutilisation de ces drones ne pourra être permise que dans le cadre d'un arrêté pour encadrer leur usage pris sur avis de la CNIL, ou s'ils sont équipés d'outils rendant impossible l'identification des personnes filmées. « Prenant acte » de l'ordonnance du Conseil d'Etat, la préfecture de police a précisé dans un communiqué qu'elle examinait, avec le ministère de l'Intérieur, « ainsi que l'y invite le juge, les conditions techniques et juridiques qui permettront de mieux répondre aux obligations » concernant l'identification des personnes.« Dans l'attente, la surveillance par drone du respect des mesures de déconfinement a été suspendue », ajoute-t-elle. L'avocat de la LDH Patrick Spinosi a salué « une victoire ». « On est là sur le volet numérique des libertés individuelles qui est le plus contemporain et certainement l'un des plus importants, car il y a un risque de glissement très sensible. » Patrick Spinosi voit dans la décision du Conseil d'Etat un « coup de semonce » contre d'autres initiatives gouvernementales, telles que l'application StopCovid, qui doit permettre d'identifier les chaînes de contamination. Si cette décision du Conseil d'Etat concerne la ville de Paris, elle devrait pouvoir être transposable partout en France.

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