L’ex-président ukrainien Petro Porochenko accusé d’abus de pouvoir
2020-06-12 14:06:47
Le milliardaire, désormais député, dénonce une « persécution » orchestrée par l’actuel chef d’Etat, Volodymyr Zelensky.
Les uns redoutent une vendetta politique, les autres jugent le dossier d’accusation aussi maigre que bancal. Mercredi 10 juin, la justice de Kiev pensait cerner Petro Porochenko, porté au pouvoir dans la foulée de la révolution proeuropéenne de Maïdan en 2014, au cœur d’une kyrielle d’affaires troubles. Mais en faisant, ce jour-là, de l’ancien chef d’Etat, un « suspect » dans une affaire d’abus de pouvoir et en allant jusqu’à s’interroger sur son placement en détention préventive, le Bureau d’investigation d’Etat a suscité le malaise. Tant chez les soutiens de Petro Porochenko que chez ses détracteurs.
« Les accusations semblent sans fondement, en particulier lorsque l’on sait qu’il y a eu toute une série d’autres poursuites, toutes de natures différentes, lancées contre Porochenko. Et que la procureure générale, Irina Venediktova, a été nommée après que son prédécesseur avait jugé que le dossier d’accusation contre Porochenko était vide », note Daria Kaleniouk, à la tête du centre d’action anticorruption (Antac), à Kiev.
« Persécution »
Dans le détail, M. Porochenko est suspecté d’avoir, en 2018, abusé de sa fonction de chef d’Etat pour placer l’un de ses proches, Sergueï Semotchko, à la tête du service de renseignement extérieur avant de le licencier en avril 2019. Une poursuite parmi plus d’une quinzaine d’autres où l’ancien chef d’Etat est suspecté d’évasion fiscale, d’abus de pouvoir ou encore de haute trahison. Avant même son audition, mercredi, l’homme qui est désormais député dénonçait une « persécution de l’opposition », pointant l’actuel chef d’Etat, Volodymyr Zelensky.
Les deux hommes, de fait, se haïssent. Les soutiens de Petro Porochenko voient dans l’ ex-vedette de la télévision élue à la présidence une marionnette à la main d’oligarques et de proches du président russe, Vladimir Poutine. M. Zelensky, lui, s’épanchait encore, jeudi 11 juin dans les colonnes de l’Oukraïnskaïa Pravda, sur son rival. « Je pense réellement qu’il est un manipulateur (…) Il a lancé [durant la campagne présidentielle ] contre moi et ma famille ces robots [ pour divulguer des fake news]… La seule chose qu’il ait faite, c’est m’insulter. »
Une détestation réciproque n’est guère suffisante pour faire de M. Zelensky le chef d’orchestre d’une revanche politique. Mais le camp de Petro Porochenko n’oublie pas ce que le président assurait, le 20 mai, en conférence de presse : « Quant à la sentence de M. Porochenko, je suis sûr que cela est encore à venir… Ils [son équipe] ont gouverné le pays de manière à ce que beaucoup d’aventures et de verdicts voient le jour. Mais je ne veux pas en parler, car ce n’est pas mon autorité. »