Huawei soupçonné d’un vol massif de données aux Pays-Bas
2019-05-16 22:15:06
Selon la presse néerlandaise, les services de renseignement du royaume jugeraient « non souhaitable » l’ouverture du marché national de la 5G au groupe chinois.
De nouveaux soupçons concernant une possible implication du géant chinois des télécoms Huawei dans un vol massif de données existent aux Pays-Bas alors qu’aux Etats-Unis, l’administration Trump bannit officiellement la compagnie du marché américain. Les services de renseignement (AIVD) refusent tout commentaire mais ils auraient, selon diverses sources, lancé une enquête pour déterminer si l’un des trois grands opérateurs nationaux – Vodafone, KPN et T-Mobile/Tele2 – a été victime de « portes dérobées » qui auraient permis à Huawei de mener des opérations d’espionnage. Un porte-parole de la société chinoise, interrogé par le journal De Volkskrant, a démenti toute implication, affirmant que « partout où nous faisons des affaires, nous respectons la législation et nous protégeons les données privées de nos clients ».
La plupart des opérateurs des Pays-Bas ont déjà recours à la technologie de Huawei (antennes, logiciels etc.) et le gouvernement devait, en théorie, se prononcer à bref délai sur la participation du groupe chinois au développement du réseau 5G dans le royaume. Une autre affaire d’espionnage, révélée en avril, avait déjà semé le doute et déclenché une enquête officielle.
ASML, une entreprise de haute technologie informatique, a dû admettre qu’elle avait été victime, durant plusieurs années, d’un vol massif de données qui pourrait se chiffrer à des centaines de millions d’euros. Des cadres de ce groupe, qui emploie 19 000 personnes dans le monde, avaient des liens avec le ministère de la science et de la technologie chinois et lui auraient permis d’avoir accès au réseau interne de la filiale américaine de l’entreprise. Une série de données, incluant des secrets de fabrication, était ainsi devenue accessible à XTAL, concurrent chinois d’ASML. Il avait ainsi pu rafler des clients de l’entreprise néerlandaise, fournisseur du Coréen Samsung notamment. Le patron d’ASML, Peter Wennink, s’est toutefois efforcé de démentir toute implication de l’Etat chinois dans cette affaire.
Si l’Australie, le Japon et la Nouvelle-Zélande campent sur la même ligne que les Etats-Unis, les Pays-Bas et l’Union européenne (UE) sont plongés en plein dilemme. Les alternatives offertes par les sociétés européennes, Nokia et Ericsson par exemple, sont plus chères et souvent jugées moins performantes. Et même si elle décrivait, en avril, avant un sommet UE-Chine à Bruxelles, Pékin comme un « rival systémique », l’Europe n’entend ni apparaître comme suiviste par rapport à Washington, ni inconsciente des potentielles implications politiques d’un bannissement de Huawei.
En mars, la Commission européenne prônait donc « une démarche coordonnée de sécurisation des futurs réseaux 5G » et « une évaluation » des fournisseurs de la future infrastructure, sans interdire Huawei, à ce stade du moins. La Commission évoquait la fixation de normes minimales de sécurité avant la fin de l’année. Quitte, pour les Etats membres, seuls compétents en matière de sécurité nationale, à décider, ou non, de s’y conformer. Certains semblent surtout soucieux de continuer à accueillir massivement des investissements chinois, sans prendre le risque de tensions avec Pékin.
Paris évoque une nécessité d’« encadrement » du recours aux équipements chinois, à Berlin on se veut prudent, Londres a décidé d’autoriser une participation de Huawei au réseau 5G, et du moins aux infrastructures les moins « sensibles », comme les antennes. Une décision qui a suscité de vives tensions en Grande-Bretagne et entraîné le limogeage, par la première ministre Theresa May, du ministre de la défense, Gavin Williamson, soupçonné d’avoir divulgué des informations à la presse. Le tout dans un contexte où Washington menace de suspendre certains échanges de renseignements avec ses alliés, soulignant que Huawei entretient des liens avec les services secrets chinois.
Aux Pays-Bas, souligne la presse, la confirmation d’un nouveau scandale pourrait peser sur la décision du gouvernement, attendue pour la fin du mois. Les services de renseignement jugeraient « non souhaitable » l’ouverture du marché national de la 5G au groupe chinois. Huawei est une société « issue d’un pays dont il est avéré qu’il conduit un programme offensif de cyberattaques contre les Pays-Bas », affirme une note lue par De Volkskrant. Selon ce document, une menace pourrait dès lors planer sur les données privées, téléphoniques et de géolocalisation. Les experts suggèrent même d’écarter les logiciels de Huawei des réseaux 3G et 4G déjà existants.
AFP.