Au procès du 13-Novembre, Salah Abdeslam livre pour la première fois sa vérité sur la nuit des attentats

  • 2022-04-15 01:25:20
L’accusé a rompu son silence pour révéler qu’il devait se faire exploser dans un café du 18e arrondissement de Paris. Il dit avoir renoncé à la dernière minute par « humanité ». Salah Abdeslam connaît le prix de sa parole et a appris à la monnayer pour obtenir l’écoute qu’il réclame. Il y a deux semaines, il avait fait usage de son droit au silence lors de la journée la plus attendue depuis le début du procès du 13-Novembre : son interrogatoire sur la nuit des attentats. Mercredi 13 avril, alors que la cour d’assises spéciale de Paris devait l’entendre une dernière fois sur les faits postérieurs aux attaques, le seul survivant des commandos a fait basculer l’audience dans une dimension insoupçonnée en une phrase : « Je vais m’exprimer aujourd’hui. » Salah Abdeslam ne s’est pas contenté de coller au programme initial de cet interrogatoire, qui devait porter sur les heures et les jours ayant suivi les attaques. Après six ans de silence et sept mois de débats, il a choisi son jour pour livrer ce qu’on avait trop attendu et qu’on n’espérait plus : le premier récit détaillé de « son » 13-Novembre. Il a notamment révélé quelle était sa mission ce soir-là : une attaque-suicide dans un bar du 18e arrondissement de Paris, à laquelle il a renoncé à la dernière minute, dit-il, par « humanité ». Avant les premières questions du président, l’accusé tient à expliquer son revirement : « Si j’ai fait usage de mon droit au silence, c’est parce que je ne me suis pas senti écouté. Je comprends que l’exercice qui est celui de la cour n’est pas facile. Mais je pense que, depuis le début de cette affaire, les gens n’arrivent pas à accepter la personne que je suis vraiment. On a cette image de moi faite par les médias, qui ne correspond pas à ce qu’on voit aujourd’hui, et ça dérange. Je décide de m’exprimer car c’est la dernière fois que j’en ai l’occasion… » A compter de cet instant, les questions de la cour importent peu. Salah Abdeslam a obtenu l’écoute qu’il cherchait. Pendant près de deux heures et demie, il va livrer « sa » vérité. Le « combattant » autoproclamé de l’organisation Etat islamique (EI) qui éructait dans le box au début du procès a laissé place à un accusé pondéré, mesurant chacune de ses paroles, calculant ses effets. Seul son récit compte désormais. Salah Abdeslam a apprivoisé son procès.

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